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Recrutement : de l’art subtil de la porte entrouverte

J’ai été récemment mandaté sur une mission de chasse inhabituelle à plusieurs égards : par mon immersion dans un secteur étroit comme une tête d’épingle d’abord ; Ensuite par la rencontre d’un manager particulier. Vraiment particulier !

Sur la piste du « Parrain »

Plusieurs des candidats que je sourçais et interviewais, pour mon client, avaient plus ou moins longuement travaillé dans l’entreprise dudit manager, par le passé. Il est une référence. Une espèce de « Parrain » très respecté dans le secteur. Mais sa particularité vient d’ailleurs. Ou du moins, le respect que ses anciens employés lui portent en était une conséquence.  

Nombre de ces anciens employés, pourtant engagés depuis 2 à 5 ans dans des carrières dans des entreprises et entités autres, et parfois concurrentes, disaient n’attendre que le bon moment…pour retourner travailler avec le « Parrain » !

Je n’en revenais pas. 

C’était plus qu’il ne m’en fallait pour trouver le moyen de parler au « Parrain ». 


Cela ne m’a pas empêché de titiller tout de même un peu les candidats, et leur demander ce que ce grand sorcier leur avait donc fait, et surtout pourquoi être partis si c’était si bien là-bas.

Invariablement j’entendais :  « Il vous fait cravacher comme un malade, mais, vous apprenez tellement en le côtoyant ! ».

Ou bien : « C’est une fusée. Il est généreux de son savoir, et il le partage tant que tu peux absorber »,

Ou encore : « A la différence des petits chefs qui semblent de multiplier comme de la mauvaise herbe, il semble dénué d’égo. Et paradoxalement, je n’ai jamais vu un patron respecté comme ça ! » 

« Ça ne m’explique toujours pas pourquoi vous êtes parti » répliquais-je à chaque fois…
« Ah, mais c’est que le Parrain était près de ses sous. La rémunération qu’il nous proposait était peu attractive sur le marché » m’avouaient-ils. 

J’ai sauté sur l’occasion de parler au dit Parrain quand le prétexte s’est présenté : un des candidats que j’avais identifié s’est révélé avoir le bon profil après interview, et acceptait de poursuivre le process. Il avait « Le Parrain » au nombre de ses références qu’il m’autorisait à appeler.

Trop content de parler au monsieur !

Secrets d’artiste

La prise de référence achevée et très positive, je lui pose la question de but en blanc, sur un ton badin destiné à briser un peu la glace : 

– Mais, monsieur, qu’est-ce-que vous faites avaler à vos employés-là, et puis quand ils vous quittent, c’est comment revenir seulement qui les préoccupe ? 

Long rire franc. Il me demande d’où je tiens ça. Je lui explique sans rentrer dans les détails.

– Ma boîte est toute petite et avec des moyens limités. Mais j’ai une certaine avance avec ma compréhension et ma vision du marché. Je grandis à mon rythme, mais demeure un acteur moyen. Je choisis mes employés très minutieusement et jeunes, j’investis en eux et il semble que j’arrive à parler à autre chose que leur portefeuille. Un temps du moins…

– Ce n’est pas mal déjà, non ?

– Ecoutez, toujours est-il qu’ils gardent un attachement émotionnel à l’ambiance chez nous, à notre culture d’entreprise, aux valeurs que mon père, qui a fondé l’entreprise, m’a transmises…

– Puis vient irrémédiablement l’heure où ils rêvent d’autre chose professionnellement, en termes d’enjeux, de périmètres, de perspectives d’évolution, et de rémunération ; toutes choses que vous ne pouviez leur donner. C’est bien ça ?

– Exactement !
– Mais ça ne m’explique pas pourquoi ils veulent revenir chez vous, et ce que vous faite pour. 

– Je ne retiens pas mes meilleurs talents quand cette heure-là est venue. Au contraire même : je facilite les choses. Ils acquièrent autre chose souvent dans les rares grandes entreprises de notre petit secteur, que je ne peux leur offrir. Mais clairement, mon intention est d’en récupérer quelques-uns, après qu’ils aient grandi ailleurs. »

– Donc c’est à moitié calculé, quand même, votre affaire-là ?

– Bof, à peine…(rire). Je maintiens la relation. 2, 3, 4 ans…jusqu’au bon moment. Même si j’ai renoncé l’usage de mon père qui veillait personnellement aux cadeaux à ces anciens au pied de notre arbre de Noël d’entreprise, je les appelle régulièrement. Ils me soumettent parfois des problématiques professionnelles au sujet desquelles j’ai plaisir à leur donner avis et conseils. Je rencontre et déjeune au moins 1 fois par an avec un petit groupe d’anciens de la société. Rencontre à l’occasion de laquelle je les tiens au courant, l’air de rien, de ce que nous faisons et vers quel avenir nous allons, je donne des indications du type de challenges et de compétences dont nous aurons besoins à 2 ou 3 ou 4 ans.

Je comprends que c’est là, à ces occasions, que le « Parrain » instillait habillement son message subliminal : « La porte reste ouverte, et vous revenez quand vous voulez, et on saura le moment venu tracer de nouveaux plans d’évolution, parce qu’on aura aussi grandi. Tant que vous ramenez aussi dans votre besace des compétences et de la maturité dont vous pourrez nous faire profiter pour les projets à venir dont je vous ai parlé ».


Il m’avoue avoir d’ailleurs réintégré ainsi, avec beaucoup de bonheur, un ancien employé qui est monté au capital de la société familiale.

« C’est de bonne guerre », dit-il avec un rire malicieux. Ces gros concurrents nous pillent sans pitié nos talents, après qu’on ait sué sang et eau pour les former. Mais ils ignorent que mon plan est de récupérer les meilleurs d’entre eux, quand ils auront, à leur tour, achevé de leur donner ce que nous ne pouvions leur donner en termes de développement professionnel à l’époque ».

Moderniser des pratiques qui ont fait leurs preuves

Le Parrain finit en avouant qu’il lui faut dépoussiérer un peu ces pratiques, anciennes, mais qui marchent bien. Il a récemment recruté un Responsable RH qui, entre autres, doit harmoniser et mettre en process tous ces usages notamment dans une stratégie de marque employeur élargie.

Il prend congé, et, de l’échange avec l’artiste, je retiens 3 choses : 

  1. On sous-estime souvent le rôle des références professionnelles dans la décision finale d’un recruteur ;

2. On sous-estime tout autant l’impact de la culture d’entreprise et du management des dirigeants des PME sur l’attachement durable des employés à l’entreprise ;

3. Enfin, savoir paver le chemin pour récupérer des pépites que l’on a dû laisser aller à la concurrence, à un moment donné, est une stratégie qui peut rapporter gros.

Heureuses fêtes de fin d’année à tous. Et à nous retrouver dans une année 2021 qu’on espère plus clémente !

Happy New Year! - Art subit

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